Si Bonnie Parker et Clyde Barrow ne se que connurent que quatre ans et demi (de janvier 1930 à leur fin tragique dans un guet-apens tendu par la police en mai 1934), leurs noms entrelacés brillent depuis au firmament des couples mythiques. Une légende exploitée par le réalisateur américain Arthur Penn, dont le biopic romancé porté par Warren Beatty et Faye Dunaway sortit en août 67 aux USA.
Au même moment, en France, Serge Gainsbourg caresse l’idée d’une collaboration avec Brigitte Bardot. Harley-Davidson sera sa carte de visite pour séduire artistiquement la Femme que Dieu créa, avant que celle-ci ne lui tombe dans les bras le soir de l’enregistrement de la chanson.
Cependant, mariée au milliardaire allemand Gunter Sachs, un bambocheur qui la surveille de l’étranger, Bardot doit à tout prix tenir sa nouvelle histoire d’amour secrète, sous peine de voir sa carrière au cinéma entravée. C’est pourquoi, lorsque l’égérie de Saint-Tropez décide d’aller passer la nuit chez son « Gain-Gain » pour la première fois, elle s’affuble d’une perruque brune et s’enroule dans un imperméable passe-partout.
Toutefois, malgré ses précautions, le sex-symbol est rapidement reconnu, et à peine après être entrés dans le petit studio, les amants entendent les voisins s’amasser derrière la porte. Ils doivent alors s’enfuir, comme s’ils venaient de « braquer une banque » d’après l’impression de l’auteur-compositeur, à qui vient alors l’idée d’écrire une chanson sur le célèbre couple de criminels traqué par le FBI.
Bien que le film de la Warner ne soit pas encore projeté dans l’Hexagone, Gainsbourg parvient à s’en procurer une copie grâce à ses relations, et, en voyant Faye Dunaway lire à Warren Beatty The Trail’s End, songe à traduire littéralement ce bouleversant poème de Bonnie Parker tout en l’organisant sous forme de duo.
En une nuit, alors que sa muse dort à côté de lui, le génie boucle paroles et musique. Le titre est enregistré à temps pour faire partie du Show Bardot avec lequel réveillonnent le 31 décembre les téléspectateurs de la deuxième chaîne de l’ORTF.
Le tableau de Bonnie and Clyde est l’un des plus savoureux de l’émission. Dans une étable de western, les deux bandits costumés par Paco Rabanne (lui en chemise blanche cintrée et cravate, elle en jupe et escarpins laissant apercevoir ses superbes jambes) toisent leurs contradicteurs, les braquant même d’un revolver et d’une mitraillette. Façon d’assumer avec aplomb une liaison qu’ils ne veulent désormais plus cacher ? Pourtant, tout comme les rebelles qu’ils incarnent, ils ne savent pas que leur amour touche déjà à sa fin.
En effet, dans les jours qui suivirent, la colère menaçante de Sachs et un tournage en Espagne obligèrent B.B à rompre. Brigitte Bardot et Serge Gainsbourg : Bonnie and Clyde, l’album qui paraît début janvier, n’est déjà plus qu’un souvenir de leur intimité.
© Giancarlo BOTTI/GAMMA
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