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Hommage
Jean-Michel Defaye

Compositeur, pianiste, chef d’orchestre et arrangeur, Jean-Michel Defaye était un musicien complet, qui a jonglé avec tous les styles, mêlant musique orchestrale classique et formats populaires. Son nom est attaché en particulier aux années « dorées » de Léo Ferré.

Il savait rire, s’encanailler avec la troupe des Branquignols, qui joue en 1953 Ah ! les belles bacchantes au théâtre Daunou à Paris, avec Jacqueline Maillan, Louis de Funès et Gérard Calvi. Il savait inventer « des variations d'après Mozart », à l’instar de ce concerto pour trompette et orchestre composé pour Maurice André en 1976. Jean-Michel Defaye n’ignorait rien de l’expressivité du jazz, ni de la dramaturgie de la chanson. Né le 18 septembre 1932 à Saint-Mandé (Val-de-Marne), le musicien est décédé le 1er janvier 2025. Adhérent à la Sacem depuis le 11 juin 1951, il en était devenu sociétaire définitif en avril 1967.

Issu d’une famille de mélomanes, Jean-Michel Defaye commence ses études musicales à dix ans avec son grand-oncle, second violon de l’Orchestre Pasdeloup. Étudiant de Nadia Boulanger, dans la même classe que Michel Legrand et Gérard Calvi, Jean-Michel Defaye décroche à 20 ans un Second Prix de Rome, avant de poursuivre son parcours au Conservatoire national supérieur de musique où il obtient le Premier Prix de composition en 1959.

Jean-Michel Defaye appartient au canal historique de la grande variété française de l’après-guerre. Via Michel Legrand, le jeune virtuose croise Jacques Canetti, patron des Trois-Baudets. Directeur artistique de Polydor et Philips, ce dernier le recrute comme chef d’orchestre maison, où il officiera souvent sous le pseudonyme de Franck Aussman. Rapidement, Jean-Michel Defaye marque de son style, sophistiqué sous une apparente simplicité, des titres historiques tels que Mon truc en plumes de Bernard Dimey et Jean Constantin pour Zizi Jeanmaire ou La Javanaise de Gainsbourg interprétée par Juliette Gréco. Passé chez Barclay, il compose pour Francis Lemarque, sans se priver d’écrire les arrangements pour les afro-sambas du guitariste brésilien Baden Powell.

Dans les années 1960 et 1970, Jean-Michel Defaye travaille pour la télévision (il compose les chansons de Bonne Nuit les Petits), et le cinéma. On lui doit en 1963 la bande originale de Pouic-Pouic de Jean Girault, où Louis de Funès s’affirme en comique burlesque, et en 1965 celle du Bonheur d’Agnès Varda. Eddy Marnay lui présente Philippe Sarde, avec qui il collabore sur les films de Claude Sautet comme Les Choses de la vie.
Jean-Michel Defaye fut le compagnon de route de Léo Ferré de 1957 (Les Fleurs du mal) à 1970 (Amour Anarchie), dans une complicité que le poète définissait ainsi : « Toi qui parles avec des notes, nous qui conversons au-dessus d'un clavier, en Do dièse ou en La bémol, savons que nous n'avons pas besoin de mots... ». Orchestrateur sachant jouer des cordes, des cuivres ou du piano, il magnifie Comme à Ostende ou La Mémoire et la mer. « L'envolée de violon de C'est extra pour donner de la couleur, le doublement de la mélodie avec un cor solo pour Avec le temps, sont mes idées. On ne pouvait tarabiscoter une chanson de Léo, l'exercice était complexe, tant le texte était essentiel », confiait au quotidien Corse Matin en 2021 Jean-Michel Defaye, installé de longue date à Bonifacio.

Pour autant, Jean-Michel Defaye n’a jamais abandonné la musique contemporaine. Depuis son concerto pour trombones et piano, Deux Danses, en 1954, en passant par Fluctuations : Trombone solo, 6 trombones & 2 percussions en 1987, il a composé des œuvres pour trombone et piano, dont, dans les années 2000, une série « à la manière de … », Schumann, Stravinsky, etc.

Dans l’écriture de Jean-Michel Defaye, il y avait un souci de la délicatesse et du charme à la française. Un style.

« Jean-Michel Defaye laisse derrière lui une œuvre multiforme, témoignage d’une vie dédiée à l’exploration sonore. De ses variations inspirées par les maîtres classiques à ses arrangements sublimes pour la chanson française, notamment comme compagnon musical de Léo Ferré, ce passionné des cordes et des cuivres a su mêler les genres et les époques avec une élégance rare. » Patrick Sigwalt, président du Conseil d'administration de la Sacem.

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Publié le 4 janvier 2025